lundi 5 juin 2017

Golf de Longwy contre le Golf d'Arlon




Le golf de Longwy est-il menacé par le projet d’un golf «pharaonique», qui doit voir le jour en 2020 à Arlon en Belgique ?
 

À Arlon, un golf qualifié de pharaonique devrait voir le jour en 2020, et pourrait provoquer quelques maux de tête aux responsables de celui de Longwy. Porté par un homme d’affaires luxembourgeois multimillionnaire, il serait accompagné d’une zone de loisirs et d’un hôtel cinq étoiles.

« Pharaonique», «immense», «le plus beau du monde», etc.  : les commentaires de la presse belge sont dithyrambiques pour qualifier le projet de golf qui devrait ouvrir à Arlon en 2020 et qui serait financé à 100  % par de l’argent privé. L’homme d’affaires luxembourgeois Roby Schintgen, multimillionnaire grâce à ses activités dans le logement notamment, s’est fait un petit plaisir il y a quelques années en achetant le domaine du bois d’Arlon pour 2,1  millions d’euros, soit 600 000 euros de plus que sa valeur estimée.

Il l’a rénové, et a ensuite eu l’idée d’installer sur les 220  hectares deux parcours de 18  trous et un de 9  trous pour les entraînements. Il souhaite aussi aujourd’hui y mettre une zone de loisirs, un club-house, et ouvrir dans le château un hôtel cinq étoiles de 86  chambres. À la clé  : une trentaine d’emplois. Sans parler des chasses qui pourraient être organisées dans les bois alentours

d’accompagner le projet en modifiant l’affectation de certains terrains, parlent également d’écologie. Ils listent l’aménagement de pistes cyclables, une récupération poussée de l’eau utilisée pour l’entretien, des plantations d’arbres à la place des épicéas pour «développer la biodiversité», une herbe importée du Maroc nécessitant un arrosage moindre, des mares mises en place ici et là, etc. En clair  : les hommes politiques et les joueurs de golf de la province et des pays voisins sont unanimes  : il n’y aurait presque pas mieux sur la planète.

Un transfert de joueurs?

Jean-Nicolas Burnotte, secrétaire fédéral du Mouvement ouvrier chrétien (MOC) de la province de Luxembourg, n’est pas de cet avis. Il a participé il y a quelques mois à l’étude «Développement territorial et utilisation parcimonieuse des sols en province du Luxembourg» sur la période 2004-2014 au sein d’un groupe de travail du MOC. Et les conclusions sont alarmantes. « On note la disparition de 2  081  hectares de terres agricoles, et de 92  hectares de forêts. Cela pose question en termes de conséquences sur les ressources locales, la biodiversité, la transformation irréversible des paysages. Parler d’écologie sur ce golf de 220  hectares n’est pas sérieux. On peut à la rigueur comprendre les motivations économiques, avec ces emplois créés. Mais on se dit que  : ça ne va pas améliorer les choses pour les paysans; l’accès de ce loisir est très coûteux, rendant impossible aux chômeurs et précaires d’y jouer; et il y a déjà un golf à 25  minutes de là, à Longwy. On est dans une conjoncture compliquée, et face à cela, les élus belges comme français proposent de construire des hypermarchés partout, et des golfs partout. Jusqu’où? Des choses ferment et vont fermer… »

L’information est évidemment arrivée jusqu’aux oreilles des membres de l’Observatoire citoyen du golf de Longwy. Qui vont dans ce sens. « Cet équipement va mécaniquement entraîner, d’une part, une rétention des joueurs belges et grand-ducaux qui fréquentent actuellement le golf de Longwy, et d’autre part un transfert d’une partie des joueurs résidant sur le secteur français. Par ailleurs, étant donné que la subvention d’équilibre versée par la communauté d’agglomération de Longwy à l’exploitant Gaïa dans le cadre de la délégation de service public prendra fin en 2021, il est probable que Gaïa, dès cette échéance, ne soit pas en mesure de poursuivre son activité faute de rentabilité financière. »

Sébastien Bonetti (Le Républicain lorrain)

« Il ne nous fera pas d’ombre »

Pour Bernard Carminati, président de l’Association du golf international de Longwy, « le golf d’Arlon ne nous fera pas d’ombre. Car on a plus de 800  licenciés, dont 65  % de personnes habitant la ville ou le Bassin. Elles n’iront pas en Belgique jouer. Ensuite, on a 28  % de Luxembourgeois, qui viennent d’Esch-sur-Alzette et du sud du pays. Eux non plus ne prendront pas d’abonnement à Arlon. Il reste 20  % de Belges, à qui on a posé la question. Ils nous ont répondu qu’ils ne savaient pas s’ils allaient s’inscrire. On n’est donc pas trop inquiets .»

Malgré tout, Bernard Carminati raconte qu’une structure identique venait de fermer le 1 er  janvier, à Gaichel, non loin d’Arlon, mais au Grand-Duché. « Il a fermé, notamment, car nous avons ouvert, et des joueurs sont venus ici. Ceci dit, je peux me tromper, mais on n’a pas vraiment à s’inquiéter. On devrait perdre une cinquantaine de joueurs, au maximum. »

Le président de l’association ne s’enflamme également pas sur le projet d’Arlon. « Il n’est pas fait. Ils auront peut-être l’autorisation pour un 18  trous, mais pas forcément pour les deux. Car il s’accompagnerait de déboisement. Il faudra des accords sur le sujet de l’écologie. On a mis dix ans à faire le golf de Longwy… »

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